mercredi 12 mars 2014

La singulière tristesse du gâteau au citron

Une fois n'est pas coutume, aujourd'hui je vais vous parler d'un livre pour en dire du mal. Reçu dans le cadre de la "ronde des poches", un swap littéraire minimaliste (chacun n'envoyant d'un seul et unique livre de poche) organisé par Armalite, ce roman avait pourtant tout pour me plaire à première vue, à commencer par un pitch original et intrigant. Jugez plutôt.
En mangeant une part du gâteau d'anniversaire de ses neuf ans, la jeune Rose découvre que son sens du goût s'est développé de façon stupéfiante. En effet, en plus des sensations habituelles, elle peut dorénavant "goûter" l'humeur et les sentiments des personnes ayant préparé les plats qu'elle déguste. Son gâteau d'anniversaire a donc goût de citron, de chocolat, mais plus encore du vide par lequel s'exprime la profonde dépression de sa mère.
Plutôt alléchant vous en conviendrez (c'est d'ailleurs le cas de le dire) et pourtant je n'ai pas aimé ce livre, je m'y suis même ennuyé et j'ai du me faire violence pour le lire jusqu'au bout. En y réfléchissant un peu la raison m'est apparu assez évidente, je n'aime pas le personnage principal et ses réactions me sont incompréhensibles. Jamais au grand jamais je n'aurai réagi comme elle a un tel "don/malédiction" inattendu/e, et ce, même aussi jeune. En effet, dés qu'elle comprends ce qui lui arrive, notre héroïne n'a plus qu'un seul but, éviter le plus possible les nourritures cuisinées par les humains, au profit de celles "usinées" et... rien. C'est quasiment la seule réaction à ce qui lui arrive dont elle fera preuve au cours du roman, avec celle, instinctive, de cacher sa particularité à ses proches. J'ai rarement vu un personnage aussi absent de sa vie, et dont la seule ambition semble être de se laisser porter par le flot. Pourtant il y aurait eu des tas de façon différentes de réagir, ne serai-ce que celle d'apprendre à cuisiner soit-même pour ne pas s'introduire systématiquement dans l'intimité des autres ou bien celle de tenter d'agir à son échelle sur les sentiments des gens, de les faire aller mieux puisqu'on n'ignore plus rien de leur mal-être. Mais non, Rose préfère les faux-semblants et les caches-misère qui lui permettent de vivre au plus proche du banal plutôt que de tenter d'utiliser son "don" d'une façon ou d'une autre. C'est un choix et l'évolution du personnage partant de ce postulat suit un chemin logique et cohérent, simplement je n'ai pas pu m'empêcher de me dire, au fur et à mesure des pages, que l'auteur passait à côté d'une possibilité de récit bien plus passionnante en choisissant cette direction et ça m'a gâché ma lecture.

"J'avalais de grandes quantités de nourriture et d'émotions. J'avais mes préférences - des familles qui venaient de loin et dont les plats étaient imprégnés des tourments du voyage."

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