lundi 26 janvier 2015

La Venus à la fourrure

Photo © Fabienne Rappeneau

Pour Noël, j'ai offert à mon mari une place de théâtre. Et pas pour n'importe quelle pièce, pour une dont je savais qu'il ignorait qu'elle se jouait à Paris, une pièce surprise adaptée d'un livre qui l'a fortement marqué : La Vénus à la fourrure. 
Le livre de Sacher-Masoch, paru en 1870, est un roman érotique. Alors comment l'adapter au théâtre puisqu'on ne peut décemment y jouer de scènes sexuelles ? Le choix de David Ives, l'auteur de la pièce est d'y rajouter un décalage et de faire jouer sur scène non pas directement le livre mais son adaptation. Pour faire plus clair, on assiste pendant l'heure et demie du spectacle à l'audition d'une actrice pour le rôle de Wanda (le personnage principal féminin du livre) par un metteur en scène désireux d'adapter le roman au théâtre. Les acteurs jouent donc d'autres acteurs qui jouent les personnages du livre. Vous avez dit mise en abîme ?
Plus que de sexe, le roman original parle de domination et de soumission et, intégré au milieu du théâtre, ce thème prends une place et une ambiguïté toute nouvelle. En effet du metteur en scène ou de l'acteur, qui domine, qui décide du visage que prendra une production ? Si cela parait évident au premier abord, l'image du metteur en scène tout puissant étant fortement imprimée dans notre imaginaire collectif, il existe sans doute des moments ou un acteur comprend tellement, "est" tellement son rôle, que le metteur en scène ne peut faire autrement que de construire son projet autour de lui, d'oublier son égo pour permettre à sa production d'être la meilleure possible. Ainsi, à partir d'un rôle de départ bien défini, Wanda transcende peu à peu son rôle d'actrice-objet pour suggérer, adapter, décider finalement de la direction de la pièce, alors que Thomas (le metteur en scène) petit à petit, se soumet, extatique, à celle qui semble créer sous ses yeux et pour son plus grand bonheur, sa pièce idéale.
Sincèrement, j'ai été bluffée de bout en bout, et ce grâce à une mise en scène plutôt simple mais moderne et à des acteurs qui jouent leur partition avec une subtilité jamais prise en défaut. J'y ai cru et j'étais dedans. Petit à petit la tension de ce qui se jouait sur scène m'a gagnée, passant du rire d'un début de pièce très drôle à une curiosité, puis à une angoisse réelle de savoir où tout cela allait nous mener. Et, si je ne compte pas vous dévoiler la fin de la pièce, sachez qu'il est loin de s'agir d'un pétard mouillé.

La Vénus à la fourrure
de David Ives avec Marie Gillain et Nicolas Briançon
Au théâtre Tristan Bernard (Paris)
Jusqu'au 21 février 2015

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